Avis sur « Quand le manga réinvente les grands classiques de la peinture chez Mana Books »
Le récent éditeur Mana Books publie des ouvrages ayant majoritairement le thème du jeu vidéo. À la marge de ce marché juteux, cette entreprise française tente de sortir des livres différents tout en gardant un pied dans la pop culture tout de même. Début mars est sorti Quand le manga réinvente les grands classiques de la peinture, une oeuvre ayant plus sa place dans le rayon art que bande dessinée. Immédiatement suivi d’un presque bad buzz sur les réseaux sociaux, le livre du club Enpitsu a eu mauvaise publicité. Reçu gratuitement et surtout gentiment avec Dragon Age, voici ce que j’en ai pensé.
Comme son nom l’indique, les membres du club Enpitsu ont souhaité regrouper plusieurs illustrateurs japonais avec le but de recréer des toiles célèbres avec le style très marqué du manga. À première on peut se demander pourquoi faire cela, surtout si on ne fait que regarder rapidement le contenu. Dès que l’on s’y intéresse un peu, on apprend et on se rend compte que l’art, depuis sa création, n’est qu’une succession d’inspirations voire de copies. Bien entendu des génies sont à l’origine de nouveaux mouvements mais les occasions sont rares car on apprend dans le livre qu’il y a, en gros, une trentaine de courants principaux depuis le début de la peinture.
Il ne fait donc aucun doute que tous les peintres ont pris des références à droite, à gauche pour s’inspirer, s’entraîner et s’améliorer. À l’aide de textes explicatifs, on apprend donc que de grands maîtres comme Van Gogh étaient à la limite du plagiat comme sa toile Japonaiserie : Courtisane, oeuvre tirée de Keisai Eisen, Unryu no uchikake no Oiran. Après avoir présenté les différents courants, les auteurs se sont penchés sur les bienfaits de la copie et c’est plutôt bien argumenté.
Voir aussi : https://japan-forward.com/east-meets-west-van-gogh-japan-exhibit-until-january-8/
Après cette introduction, on rentre dans le vif du sujet avec la reproduction de 43 peintures par différents auteurs. Chaque oeuvre est représentée sur une double page où la reproduction prend une page entière sur du papier de très bonne qualité, sur une page un poil plus grande que du A5. La page de l’autre côté montre l’original et est suivie d’un texte explicatif sur l’auteur d’origine, ainsi que ses inspirations et le contexte de la création. Alors que les cours d’arts plastiques du collège étaient les pires moments de la semaine (avec la musique !), ces descriptions sont très intéressantes et nous permettent d’en apprendre plus sur ces personnes qui ont écrit l’histoire.
L’attirance vers la peinture ou l’art en général est un débat infini où l’un va adorer une peinture et l’autre la détester. Si vous êtes comme moi et n’avez pas le recul, les connaissances ou que sais-je pour ressentir quelque chose en voyant une toile, vous ne pouvez juger cela que par « j’aime » ou « j’aime pas ». Le style japonais est malheureusement sujet à un trop fort débat de la part du grand public et cela se termine très souvent par un « mouif » général. Il n’y a que dans la culture pop et ses fervents défenseurs que cela semble passer cependant retrouver la célèbre Laitière avec une poitrine énorme est plus que limite. Fort heureusement ce genre de chose disproportionnée habituelle dans l’art japonais de maintenant est assez rare et la plupart des reproductions sont vraiment belles et bien pensées.
En ajoutant des éléments du folklore asiatique, les auteurs s’inspirent des grands maîtres et y ajoutent un style et des choses que leur sont chères. On retrouve aussi des couleurs très vives propres au pays du soleil levant. Si ces dessinateurs et dessinatrices contemporaines ont réalisé un superbe travail (pour la plupart car je n’aime pas certaines créations), je regrette cependant qu’ils n’aient pas une place plus en avant. Certes Quand le manga réinvente les grands classiques de la peinture est avant tout une vitrine pour les anciens peintres et leur histoire, les nouveaux créateurs ne sont même pas présentés ainsi que leurs œuvres majeures. On trouve tout juste quatre pages à la fin où de petites boites contiennent les idées qu’ont eues les illustrateurs pour les reproductions et cela se résume à deux ou trois phrases maximum.
Si on fait abstraction de quelques pages limites, j’ai envie de dire que ce livre m’a plu car j’ai appris des choses et certaines planches sont vraiment cool. Passez ce bouquin à quelqu’un qui veut en apprendre plus sur Van Gogh, Manet ou d’autres auteurs dans diverses époques, et cette personne ne sera peut-être comblée mais en ressortira avec de nouvelles connaissances. De plus Quand le manga réinvente les grands classiques de la peinture permet de mettre en avant le style manga trop peu connu du grand public. Par contre si ni la peinture ni le manga vous intéresse, difficile de vous le recommander car si vous n’avez aucune sensibilité dans ces deux domaines, cela ne risque pas de vous faire changer d’avis…
Un chouette livre aux dessins inégaux qui aurait une place parfaite à la bibliothèque ou au CDI pour intéresser les jeunes à l’art. Il manque cependant de réelles recherches et explications plus poussées sur les peintures et les peintres mais il porte très bien son rôle d’introduction dans ce monde. Si vous voulez en savoir plus, des livres plus riches existent.
Quand le manga réinvente les grands classiques de la peinture est disponible depuis le 8 mars chez Mana Books et est vendu 17€ pour 112 pages.
Preview gratuite avec les vingt premières pages : http://mana-books.com/uploads/preview/Quand-le-manga/index.html
Site officiel : http://mana-books.com/news/quand-le-manga-reinvente-les-grands-classiques-de-la-peinture-arrive-au-bureau