[Le Radis de Minuit] Raiders of the lost Shark
Raiders of the lost Shark
Salut mes Droogies. Engagé comme consultant extérieur par TAG, je vais essayer de me montrer à la hauteur de la tâche, et tenter de vous sortir de la situation inextricable dans laquelle vous vous êtes mis avec Marco.
Il est fort, il est beau, il sent bon le sable chaud. Quand vous l’avez pécho à Ibiza, où il était vaguement DJ et mannequin, et que vous l’avez ramené dans votre appartement, vous avez bien remarqué que Marco était un peu simplet, mais il était si esthétique. Malheureusement, hier soir, un drame survint. Marco a eu une idée et vous a dit, sourire aux lèvres :
«Ce soir, je choisis le film».
Vous avez tout de suite imaginé le pire, mais il était tard, et vous n’aviez pas envie de passer des plombes à lui expliquer qu’Agnes Jaoui n’a jamais été une réalisatrice, qu’Alain Chabat n’est plus drôle depuis les nuls et que si il y avait un seul film valable reposant sur une bande originale de Francis Lay, il s’appellerait Francis Beau. Aussi, renonçant mais ne voulant pas que ça se voie trop, vous avez transigé :
«D’accord, mais je choisis le film demain».
Marco a donc choisi le film et vous avez souffert, mais, magie de la narration et d’internet, avec ses électrons parcourant à la vitesse de la lumière le wifi de la fibre optique, c’est déjà demain, il est 18h45, l’heure de la vengeance a sonné et vous êtes sur [Le Radis de Minuit], bien décidé à trouver quelque chose. Et j’ai quelque chose pour vous, c’est «Raiders of the Lost Shark».
L’œuvre est réalisée par Scott Patrick. On a envie de dire que c’est un réalisateur-producteur-scénariste-animateur-pizzaïolo injustement méconnu, mais en fait non. Il est méconnu parce qu’ il a réalisé un tout petit nombre d’œuvres, et que vue la qualité des œuvres, sa carrière ne survivra sans doute pas longtemps. L’essentiel du budget a été mis dans l’affiche. Avec un titre pareil, elle imite à la perfection celle des aventuriers de l’arche perdue. On y voit un requin géant, des hélicos, des demoiselles faisant du scooter des mers… Plein de choses qu’en fait, vous ne verrez pas dans Raiders of the Lost Shark. Il faut dire que la production avait un budget limité, nous y reviendrons plus tard.
Avec tout cela, je vous sens déjà alléché à l’idée de la merveilleuse soirée que vous allez passer avec Marco. Le titre, l’affiche… Bien qu’il ne soit pas question de spoiler quoi que ce soit (même si dans notre cas, la forme surpasse de loin de fond), laissez moi vous narrer le pitch :
Quelques étudiants décident de passer un moment sur une île réputée dangereuse parce qu’un monstre y rôde. Le monstre en question est en fait un requin reprogrammé par un scientifique fou, autrefois financé par l’armée qui espérait tenir là l’arme de combat idéale. Finalement, le scientifique étant vraiment trop fou, l’armée a laissé tomber mais le scientifique poursuit ses expériences, son requin terrorisant (et dévorant un peu) la population alentours. Courageuse, la prof décide de venir sauver ses étudiants, aidée par une copine puisque la situation n’est point aisée. Ah oui, je dois préciser que le requin vole – Raiders of the Lost Shark –
Le plus extraordinaire, dans ce projet, c’est que le réalisateur ait réussi à embarquer des gens dans une telle aventure. Je dis « gens » car il est difficile de parler d’acteurs, même si certains s’en sortent mieux que d’autres. C’est filmé au caméscope, le son parfois inaudible, joué avec les pieds. Quand aux trucages, en lien direct avec le budget que nous avons déjà évoqué sont fabuleux. Le requin est apparemment fait avec un poisson mort (ou une très vieille chaussette) sur lequel ont été adaptés des yeux d’ours en peluche.
Hypnotisé par la bêtise de ce truc, il est impossible d’arrêter avant la fin, tant il est indispensable pour un esprit éclairé de savoir jusqu’où seront repoussées les limites du soutenable. Oubliez toutes les comédies franchouillardes, tous les films gores sud-américains et tous les pornos japonais que vous avez pu voir dans votre vie : Raiders of the Lost Shark est pire. Il est donc forcément réservé à une élite, à l’esprit particulièrement ouvert, prêt aux expériences sensorielles les plus extrêmes. D’ailleurs, pendant que vous regardiez, Marco a fait sa valise et est reparti. C’était le but, non ?