Retro-critique – Hellboy 2: The Golden Army

En 2008, avec la sortie d’Iron Man et son succès planétaire, commençait officiellement le Marvel Cinematic Universe et son cortège de films formatés PG-13, nouveau mètre-étalon des adaptations de comics sur grand écran. Pourtant, cette même année, Guillermo Del Toro proposait pour la deuxième fois sa vision très personnelle du Hellboy de Mike Mignola, à des années-lumière des blockbusters de studio réalisés par des yes-men sans ambition artistique affirmée. A l’instar de son Blade 2 (et avec le même accueil public mitigé), Del Toro propose avec Hellboy 2 : The Golden Army un chef-d’œuvre d’une beauté inquiétante, comme sait si bien les faire le réalisateur du Labyrinthe de Pan.

The Golden Army propose une histoire originale écrite par Del Toro et Mignola, qui voit s’affronter Hellboy (toujours incarné par Ron Perlman) et le Prince Nuada (Luke Goss), un puissant seigneur féerique en exil. Ce dernier menace de briser un trêve millénaire entre les humains et l’ancien peuple en réveillant les Légions d’Or, une armée d’automates indestructibles créée par les gobelins. Toujours épaulé par Liz (Selma Blair) et Abe (Doug Jones), Hellboy devra choisir entre sauver une humanité qui le rejette ou laisser Nuada accomplir son funeste dessein pour préserver les vestiges de son peuple. Après avoir confronté le démon cornu à l’image paternelle dans le premier film, Del Toro oppose Hellboy à sa parfaite némésis : un champion immortel qui a choisi de se battre pour ses semblables et non pour ses geôliers.

Au-delà de son scénario, qui propose un véritable dilemme à un héros hors des canons habituels, The Golden Army nous invite également à nous immerger dans un bestiaire aussi varié qu’inquiétant, issu directement de l’imagination fertile de Guillermo Del Toro. Entre la séquence de la nuée de « fées des dents » et celle du marché troll, on assiste émerveillé à un défilé de créatures dont l’apparence provoque un mélange de répulsion et de fascination, marque de fabrique du réalisateur mexicain. Pour donner vie à cette faune étrange, Del Toro a fait appel à des maquillages et des prothèses pour plus de vraisemblance, quitte à imposer des séances de maquillage interminables à ses acteurs, qui ont littéralement sué sang et eau pour concrétiser la vision d’un rêveur à l’imagination fertile et débridée.

Côté réalisation, The Golden Army prouve la maîtrise visuelle et narrative de son réalisateur. Aussi à l’aise dans les scène d’action que dans les scènes intimistes, Del Toro a un sens du cadrage certain pour mettre en valeur ses personnages, les plaçant au cœur de l’attention du spectateur. On ne compte plus les plans iconiques qui impriment durablement la rétine, de la séquence animée racontant la légende des Légions d’Or à la rencontre entre Liz et l’Ange de la Mort, en passant par l’affrontement entre Hellboy et un esprit sylvestre. Bercé par la partition envoûtante de Danny Elfman, on a l’impression de contempler un spectacle rare, la rencontre improbable entre comics et contes baroques, le tout emballé dans un blockbuster aux choix visuels résolument rétros qui ne sont pas sans rappeler Ray Harryhausen (source d’inspiration majeure pour Del Toro).

Hellboy 2 : The Golden Army est sans conteste l’un de mes films préférés de Guillermo Del Toro, ce qui n’est pas peu dire quand on sait que le réalisateur mexicain à quelques perles à son actif (L’Echine du Diable, Le Labyrinthe de Pan…). Voir se concrétiser à l’écran un tel foisonnement imaginatif, avec une maîtrise formelle qui force l’admiration, n’est pas donné tous les jours, à fortiori quand on parle d’adaptation de comics. De plus vous pourrez trouver le double blu-ray, avec un long making-of et un commentaire audio passionnant du réalisateur, à prix raisonnable en raison de l’échec commercial (totalement injustifié selon moi) du film en salle et en vidéo. Comme il semble totalement exclu de voir la suite des aventures de Hellboy sur grand écran, vous savez ce qu’il vous reste à faire…