Ryuutama, un voyage tout en légèreté
Ryuutama ou le croisement improbable de Gygax et Miyazaki
Avant de vous donner envie de jouer à Ryuutama (enfin essayer), permettez-moi de me présenter quelque peu: je m’appelle Kakita Somy et j’aurai la lourde tâche de vous parler du monde fascinant des jeux de rôle ici, sur TAG. Présenté de la sorte, cela peut sembler très restrictif mais comme tout geek qui se respecte, il n’est pas exclu qu’à l’occasion je vous présente d’autres petites choses qui me tiennent à cœur (et elles sont nombreuses).
Surtout n’oubliez jamais: vos dés et votre imagination sont les seuls choses dont vous avez besoin pour partir à l’aventure…
La couverture de Ryuutama donne immédiatement le ton : une jolie illustration aux couleurs pastels et aux personnages baroudeurs et souriants, que l’on associe immédiatement au style manga. Elle résume parfaitement ce qu’est Ryuutama, à savoir un jeu de rôle venu du Japon où il est question de voyages dans une ambiance foncièrement positive. A l’heure où les joueurs ont tendance à privilégier les univers « sombres et matures », le jeu d’Okada Atsuhiro fait l’effet d’une brise fraîche en plein été. Attendez-vous à être dépaysé, au propre comme au figuré.
Pensé comme un jeu d’initiation, Ryuutama se montre très didactique et réussit un pari assez malin : initier de nouveaux joueurs (et maître de jeu¹) en leur proposant un système inspiré des J-Rpg². Les mécaniques du jeu, faciles à prendre en main et illustrées avec pertinence et humour, mettent l’accent sur le voyage (déplacement, orientation, campement) et le ressenti des personnages sur ce périple avec le Test de Condition, qui détermine le moral du personnage pour la journée et permet ainsi d’orienter son roleplay³ en conséquence. Le maître, qui possède son avatar en jeu (l’Homme-Dragon), dispose de nombreux outils pour gérer au mieux ses parties et créer son univers.
En effet, le jeu ne propose aucun cadre « par défaut » et il revient autant au maître qu’aux joueurs de faire vivre le monde dans lequel ils vont évoluer. C’est d’ailleurs ensemble qu’ils devront créer leur lieu de départ avant de partir à l’aventure. Ce point particulier peut dérouter voire rebuter les débutants mais tout est fait pour les accompagner dans ce processus au moyen de fiches synthétiques bien pensées. Ajoutons à cela trois scénarios détaillés et un synopsis de campagne et l’inspiration ne devrait pas manquer.
Le partage ne se limite toutefois pas à la création d’univers : les joueurs se verront ainsi confier un certains nombre de tâches traditionnellement dévolues au maître, sous couvert d’un rôle tenu par leur personnage au sien du groupe de voyageurs (comme le Chef qui gère l’initiative en combat). Tout est donc fait pour fluidifier la partie technique et donner à chacun une place dans le rythme de la partie. Ce rythme très segmenté rappelle sans ambiguïté les routines des jeux de rôles vidéos, jusque dans le système de combat qui se réapproprie habilement les codes du combat tour par tour.
Ryuutama réussit donc un pari assez audacieux : proposer un jeu de rôle d’initiation inspiré de son ennemi juré, son « équivalent » console. Très marqué par ses origines japonaises, il propose une expérience de jeu basée sur le voyage et une fantasy légère et positive qui devrait plaire aux débutants par son accessibilité. Les vétérans trouveront quant à eux un jeu qui les dépaysera dans leur pratique par ses parti-pris ludiques peu courants sous nos latitudes.
Ryuutama est un jeu de rôle papier japonais créé par Okada Atsuhiro, illustré par Nagamori Ayako et édité en France par Lapin Marteau
¹ maître de jeu (ou meneur de jeu): joueur chargé de la narration et de l’arbitrage d’une partie de jeu de rôle; souvent abrévié en MJ
² J-Rpg: abréviation de Japanese Roleplaying Game, soit la déclinaison japonaise du jeu de rôle vidéo comme la série des Dragon Quest dont Ryuutama est inspiré
³ roleplay: littéralement « jouer un rôle » soit l’action d’incarner un personnage directement (en parlant comme il le ferait) ou indirectement (en décrivant ses actions, pensées, etc…)