Test jeu vidéo – Jurassic World Evolution, adaptation réussie ? (PC)
Lorsqu’on entend le célèbre thème initialement composé par John Williams se lancer dès le menu principal de Jurassic World Evolution, c’est tout un tas de souvenirs qui remontent agréablement à la lisière de notre conscience. La résurrection des dinosaures en animatronique… La mythique scène des toilettes où un pauvre gus se fait croquer par un tyrannosaure affamé… Les charismatiques vélociraptors… Autant de moments ancrés dans la mémoire collective de gosses nés dans les années 80, qui aujourd’hui encore ont les paupières frétillantes en se remémorant, avec une chaude nostalgie, ces pauvres hères se faire dévorer tout crus par des créatures ancestrales. Dès lors, moult studios vidéoludiques ont tenté (avec plus ou moins de succès) d’adapter le bébé sacré de Spielberg, pour profiter d’une fanbase fidèle et prête à s’enjailler au contact de leurs reptiles favoris. Aujourd’hui, c’est au tour du studio Frontier de relever le défi – ceux-là même qui ont développé le très acclamé Planet Coaster – en mettant en scène nos chers dino’ dans un jeu de gestion de parc d’attraction. Même si le studio anglais paraît aguerri dans ce domaine, les joueurs les plus méfiants – ceux qui tâtent du clavier et caressent leur souris à longueur de journées – savent qu’adaptation est parfois (souvent ?) synonyme de bidon. Et c’est sur cette rime délicate que ma logorrhée introductive vient à se tarir, en ne laissant poindre qu’un unique questionnement : combien de visiteurs de mon parc vont se faire bouffer ?
Oh le beau dino !
C’est la main fébrile et la tête pleine de doutes que j’ai lancé pour la première fois Jurassic World Evolution. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que les premières heures de jeu ont eu pour principal effet de me décrocher la mâchoire : déjà à l’écoute d’une bande-son orchestrée avec brio, reprenant les principaux thèmes de la célèbre saga qui ont su maintes fois prouver leur efficacité par le passé, agrémentée de doublages convaincants ; mais surtout en lorgnant sur la plastique avantageuse du soft de Frontier. Ne vous attendez pourtant pas à évoluer sur des îles à la beauté incomparable ; ces dernières sont finalement plutôt banales, avec leurs forets tropicales peu détaillées et leurs grandes étendues d’herbe pas particulièrement savoureuses. Non, c’est surtout à la découverte de vos premiers dinosaures que votre palpitant va s’emballer et vos mirettes briller de mille feux. Car ceux-ci sont beaux, très beaux. C’est le sourire au visage qu’on observe son tricératops gambader vers une source d’eau fraîche pour s’abreuver ; ou qu’on surprend son tyrannosaure en train de prendre en chasse un pauvre struthiomimus pour l’attraper dans sa gueule béante. Les reptiles s’animent avec une fluidité dingue et c’est avec plaisir que l’on zoome sur leur trogne pour admirer leur niveau de modélisation. Ainsi, on part la fleur au fusil à la découverte des herbivores et carnivores qui peuplent le jeu ; pour une quarantaine d’espèces au total à débloquer, soit un beau pactole (même si on peut regretter l’absence d’espèces aquatiques ou volatiles). Sauf que, pour en arriver là, il va falloir du temps et être doté d’une patience de moine bouddhiste. Et là, c’est notre enthousiasme qui s’affaisse. Mais nous y reviendrons plus tard.
Comme dans de nombreux jeux à la sauce gestion/tycoon, Jurassic World Evolution propose d’incarner le gestionnaire d’un parc d’attraction dont l’objectif sera de rendre ce dernier le plus prestigieux possible ; en d’autres mots, qu’il rapporte une belle pelletée de billets verts. Le soft de Frontier installe votre ogre capitaliste sur 6 îles différentes (l’une d’entre elles servant seulement de bac à sable sans restriction d’argent), dont 4 sont verrouillées au début du jeu. Pour les débloquer, il est nécessaire d’augmenter le niveau de prestige de votre parc – symbolisé par une note sur 5 étoiles – en répondant au mieux aux exigences de vos riches clients ; que ce soit en construisant des attrapes-touristes classiques (hôtel de luxe ; boutiques de souvenirs ; fastfoods ; etc.) ou en présentant des dinosaures rares et originaux. Ainsi, vous aurez dans votre parc une division de recherche à disposition, avec laquelle il sera possible de débloquer de nouveaux bâtiments ou des particularités génétiques pour vos dinosaures. Ces derniers pourront être par exemple plus forts, insensibles à certaines maladies, ou présenter une peau aux couleurs farfelues, à même d’attirer le regard du chaland venu visiter votre parc. De la même manière, il est possible en deux clics d’organiser des fouilles archéologiques pour mettre le grappin sur des fossiles de dinosaures, afin d’améliorer le génome de vos créatures, ou pour en débloquer de nouvelles.
A partir du moment où vos dinosaures prennent vie, il est important de prendre soin de leur bien être. Ce dernier est représenté par deux jauges de confort et de santé, qu’il faut s’efforcer de maintenir à leur valeur maximale, au risque de voir votre bestiole passée de vie à trépas, ou pire, d’avoir des velléités de liberté la poussant à s’échapper de son enclos pour piétiner quelques visiteurs malheureux. Il est donc nécessaire d’être vigilant à ce qu’un dinosaure ait de la nourriture à disposition, un point d’eau et un peu de végétation ; mais aussi, pour les espèces les plus sociables, d’avoir des congénères présents dans l’enclos pour batifoler avec eux. Que les plus anxieux d’entre vous se rassurent, il est aisé de conserver les jauges en question à une valeur non critique, les dinosaures ayant finalement peu de grands besoins. Bien sûr, il arrive parfois que l’un d’entre eux se choppe une gastro bien sale et risque de la refiler à ses copains, mais il suffira alors de débloquer le médicament correspondant via l’arbre de recherche, puis de l’administrer grâce à une équipe de gardes courageuse pour endiguer l’épidémie. Dommage enfin que les interactions entre les dinosaures ne soient pas plus complexes et diversifiées, car ceux-ci ne font pas grand chose à part manger, boire et se promener dans leur enclos.
Tricéra-bored
Sur le papier, tout est intuitif et d’une grande simplicité. Là ou le bât blesse, c’est que la grande majorité de vos actions (construire un bâtiment ; développer une nouvelle recherche ; déterrer un fossile ; etc.) déclenchent un compte à rebours allant de quelques secondes à plusieurs minutes. Ajoutez à cela le fait qu’en début de partie l’argent s’engrange très lentement, alors que chaque construction et amélioration coutent un fric dingue, et vous pouvez vite vous retrouver plonger dans un état semi-léthargique face à de longs temps morts. Il n’est ainsi par rare de faire un alt-tab pour vous lancez un épisode de Friends sur Netflix afin de tromper l’ennui, en attendant que le compte en banque se remplisse. Un comble. Ironiquement, le problème inverse se pose une fois la partie assez avancée puisque l’argent finit toujours par couler à flots, ce qui a pour conséquence de décroitre méchamment la difficulté en laissant les joueurs avides de défis sur le carreau.
Mais c’est là le prix à payer pour Frontier d’avoir voulu faire un jeu facile et accessible à tous, quitte à ce que sa profondeur en pâtisse. Ainsi, au delà du fait de placer vos bâtiments ou votre réseau de pylônes électriques, les possibilités de personnaliser votre parc sont très pauvres : il n’y a par exemple aucun moyen de décorer votre joujou, ce qui l’oblige à être froid, aseptisé et sans éclat. Cette pauvreté de Gameplay se retrouve d’ailleurs dans la partie marketing du titre presque inexistante, qui se résume juste à fixer les prix des souvenirs/repas que proposent les magasins du parc et d’y ajouter ou non du personnel. Ne vous attendez donc pas à lancer des campagnes publicitaires agressives ou à engager des mascottes ridicules pour faire la promotion de vos attractions, car il n’en sera rien. Quand on pense que le très bon RollerCoaster Tycoon faisait aussi bien – voire mieux – il y a presque vingt ans en terme de gestion de désir de la clientèle, ça fait tâche.
Le Chaos : une recette toujours efficace
Une trop grande simplicité n’est pas nécessairement un frein à une bonne dose de fun, surtout pour les plus néophytes des jeux de gestion. Là où Jurassic World parvient à se démarquer, c’est dans ses événements aléatoires qui mettront à l’épreuve votre parc, pouvant le faire sombrer à tout moment dans le chaos le plus ensanglanté. Il est déjà important de noter que le soft met en scène trois divisions dans le parc qui vont proposeront des missions (au travers de dialogues d’un cliché assumé) que vous pourrez accepter ou refuser : la division scientifique vous pousse à effectuer des recherches concernant les dinosaures ; la division sécuritaire cherche à optimiser les défenses de votre parc quitte à sacrifier quelques gardes ou civils ; la division divertissement s’évertue à envoyer du rêve en terme de loisirs pour les visiteurs. Remplir les objectifs de ces factions est important, d’une part car cela permet de débloquer certaines avancées technologiques tout en remplissant votre portefeuille, d’autre part car une faction lésée est une faction belliqueuse qui pourra, par exemple, ouvrir les portes des enclos et générer un joyeux bordel.
Ajoutez quelques catastrophes naturelles bien senties et votre parc entrera inévitablement en ébullition à un moment donné. Quand cela arrive, on se surprend généralement à rire avec machiavélisme en observant les visiteurs du parc paniquer et s’enfuir vers un abri face à la course d’un carnassier aux dents longues. Une fois l’enthousiasme malsain initial passé, on sort ensuite l’hélicoptère et on joue au sniper en balardant de la fléchette anesthésiante à foison pour rétablir l’ordre dans le parc. Car oui, Jurassic World Evolution donne l’opportunité de prendre le contrôle des jeeps et hélicoptères initialement à disposition de vos équipes de gardes ; du gadget certes, mais toujours amusant à pratiquer.
Au final, ça donne quoi ?
Difficile de trancher concernant le titre de Frontier qui n’est ni réellement bon, ni franchement mauvais. Les amateurs de jeu de gestion regretteront son manque de complexité et de profondeur ; là où les plus profanes profiteront d’un jeu facile d’accès qui ne fait pas de chichi. Pour ma part, Jurassic World Evolution a su me procurer quelques moments d’amusement, hélas entrecoupés par de longues périodes d’ennui et de nombreux bâillements, qui me laissent en bouche un goût d’inachevé.
Les plus : Beau ; Des moments assez jouissifs ; La licence ; Musique et doublage
Les moins : Peu de profondeur ; Trop facile ; De longs moments d’ennui une fois le plaisir de la découverte passé ; Répétitif
Fiche du jeu
Titre : Jurassic World Evolution
Style : Gestion
Développeur : Frontier Developments (UK)
Éditeur : Frontier Developments
Sortie : le 15 mai 2018
Plateformes : PC ; Playstation 4 ; Xbox One
Prix : 54.99€ sur PC
Langues : textes et voix en français
Site officiel : frontier.co.uk
Informations à jour au 5 août 2018
Clé cd offerte pour la réalisation du test.